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La construction, un métier de femmes

Sur tous les continents et dans de nombreuses régions du monde, les savoir-faire des femmes constructrices sont encore très vivants, particulièrement dans l’habitat auto-construit et informel. Malheureusement ces savoir-faire ne font que rarement l’objet d’études et de reconnaissance et souffrent plus que jamais de l’invisibilisation et de la dévalorisation des activités et métiers dits féminins.
Aujourd’hui en France dans les métiers du bâtiment, les femmes représentent à peine plus de 1 % des effectifs sur les chantiers[1][2]. Pourtant, en Europe l’histoire montre que ce secteur n’a pas toujours été l’apanage des hommes. Des maçonnes, charpentières, ou tailleuses de pierre ont bel et bien participé à la construction des villes et leur travail était valorisé de la même manière que celui de leurs confrères. Mais dans les sociétés européennes, comme dans d’autres régions du monde, dans le courant du siècle passé, les modes de production du domaine bâti se sont professionnalisés, mécanisés et masculinisés.

Devant la nécessité de redonner aux constructrices une place visible et valorisée, des initiatives émergent ici et ailleurs comme l’évènement-formation terre, femmes et savoir-faire qui a eu lieu pour la première fois en octobre 2020[3] aux Grands-Ateliers à Villefontaine en France. Deux semaines intenses où des artisanes d’Europe ont été mises à l’honneur en les invitant à partager leurs savoir-faire dans le domaine de la construction en terre. De nombreuses participantes, la plupart issues du secteur de la construction, ont eu l’occasion d’expérimenter, d’échanger, de se former, et surtout de se rencontrer. Ce film retrace quelques bribes du vécu de certaines d’entre elles. Les témoignages qu’elles nous livrent questionnent la place des femmes dans un secteur aujourd’hui particulièrement genré et dominé par les hommes et mettent en lumière les difficultés rencontrées et les stratégies adoptées pour évoluer dans leur profession.
Plus largement dans les processus de fabrique de l’habitat qui ne s’arrêtent pas à la technique et à la construction, et à différentes échelles – territoire, communauté, village, maison – les femmes jouent un rôle important dans la majorité des cultures et sociétés du monde. Toutefois, les parcours retracés dans ces brèves interviews questionnent sur la reconnaissance de ce rôle et montre la nécessité de mieux identifier, au prisme du genre, quelles sont les inégalités propres à chaque contexte et région et quels sont les enjeux individuels mais aussi structurels, et les conséquences sociales, économiques et environnementales.

Dans le contexte européen, celui du film, la fabrique e l’habitat s’est vu dissociée en rôles distincts, et genrés, qui peinent à interagir: La conception, les choix techniques et la construction véhiculent des valeurs masculines valorisées, alors que la gestion, l’entretien et l’usage domestique, sont associées à des activités dites féminines peu reconnues. Ce cloisonnement stéréotypé des rôles a de nombreuses conséquences notamment sur la limitation des libertés, le manque de prise en compte des besoins spécifiques des femmes et des personnes discriminées dans la construction des villes aujourd’hui et participe à maintenir et renforcer les inégalités d’accès et de droit à un logement digne et durable pour toutes et tous.

La prise en compte des facteurs d’inégalité propre à chaque société, tel que le genre, mais aussi le handicap, la classe sociale, la religion, l’origine ethnique, le contexte socio-culturel et économique, le contexte territorial (urbain, rural) et de leur imbrication dans les processus de construction de l’habitat font émerger de véritables perspectives de changement vers une société plus égalitaire où chacune et chacun aurait le pouvoir d’agir et de participer à construire un habitat digne, adapté à ses besoins et durable.

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